Etats-Unis d'Amérique : Petit guide efficace de survie en jungle urbaine

USA


Tout d'abord, commençons par le bon bout : comment et où tout a débuté... Regardez attentivement cette photo : c'est le point de départ de toute l'histoire.
L'endroit s'appelle le "Mickey's Dining Car" et se situe à Saint Paul, l'une des deux "villes jumelles", dans le Minnesota, l'autre étant Minneapolis. Mickey's Dining Car, repaire de voleursS'il vous arrive de vous retrouver dans cette ville, ne vous laissez pas attirer par le style rétro de ce "restaurant". Si le coeur vous en dit, prenez d'abord une photo, ensuite vos jambes à votre cou et éloignez-vous aussi vite que vous le pouvez. J'ai fait l'erreur d'y entrer pour un repas, et ce faux pas s'est avéré non seulement très coûteux, mais en plus m'a causé toute une série de soucis dont je me serais bien passé.

Pour aller droit au but, tout mon argent m'a été volé là. Par l'un des employés. En fait, ils étaient deux complices (sur un total de trois membres du personnel, belle moyenne !). J'ai bien entendu contacté la police dès que je me suis rendu compte de ce qui s'était passé et je suis retourné sur les lieux pour demander à parler à la gérante. Celle-ci m'a semblé au téléphone désireuse de me venir en aide, mais cela n'a, dans les faits, pas donné le moindre résultat concret. Il ne lui aurait cependant pas été trop compliqué de ne fût-ce que regarder les enregistrements de surveillance vidéo, comme elle avait promis de le faire...
L'enquête de la police n'a pas été plus concluante. Il est vrai que l'agent de police qui m'a été envoyé m'avait prévenu qu'il n'y aurait vraisembablement rien à en attendre. Mais il s'est au moins démené un minimum : après avoir entendu ma version des faits, il s'est effectivement rendu sur les lieux et a lui aussi contacté la directrice. Ensuite, de ce qu'il en est advenu, je n'en sais pas grand'chose ("rien" serait d'ailleurs plus conforme à la réalité, puisque je n'ai pas reçu la moindre information), d'autant plus que mon programme établissait que je quittais cette même nuit le Minnesota pour me rendre vers Chicago. J'imagine sans peine que tout cela a été classé sans suite, enterré et oublié.

Cela m'est arrivé dès le troisième jour de mon séjour; heureusement, il me restait un tout petit peu d'argent en poche, mais je ne devais pas m'attendre à beaucoup de soutien de ma carte de crédit, qui avait pratiquement atteint ses limites, vu que je venais de l'utiliser pour régler mes vols, nuits d'hotel et déplacements. Cette mésaventure a ruiné mes vacances, et j'ai bien dû me résoudre à les passer "autrement" (sous-entendu, "que prévu", "que d'habitude"), mais au moins je n'étais pas sans toit et ne devais plus me tracasser d'où j'allais dormir. Cependant, je devais quand même encore manger et occuper d'une manière ou l'autre les journées qui me restaient à passer sur place, et qui à cet instant précis me semblaient devoir durer une éternité chacune.

Ce n'est qu'une fois de retour que je me suis décidé à raconter cette histoire. Non seulement pour mettre en garde ceux qui auront pris le temps de la parcourir (jusqu'ici, le message que je désire faire passer est celui-ci : attention où vous mettez les pieds !!!) mais aussi pour tenter de décrire ce que j'ai fait et peut-être donner quelques idées à ceux qui, à ma suite, devraient passer quelque temps dans une grande ville en étant pratiquement fauchés. Et il y aura peut-être même moyen d'y trouver quelque joie.
L'hypothèse de départ derrière tout ce récit consiste donc à se dire qu'on ne va pas se contenter de simplement errer toute la journée dans les rues, à attendre le moment d'aller se mettre au lit...

Il est entendu que de l'argent qu'il vous reste, la plus grande partie servira à vous nourrir... Je me suis alors souvenu d'un livre(1) lu peu de temps auparavant dans lequel un sage balinais explique à son nouvel élève que la nature humaine est telle qu'il est très difficile de répondre purement "non" à une demande. Votre interlocuteur va au moins essayer de trouver une alternative pour répondre au moins partiellement à votre requête. C'était pour moi l'occasion rêvée de faire, moi aussi, à l'instar du "héros", ma petite expérimentation personnelle de cette théorie. Je n'aurais jamais imaginé me retrouver un jour dans un établissement à demander au gérant s'il pouvait m'offrir un petit déjeûner à prix réduit (je n'ai quand même pas eu le culot de le demander pour rien). Résultats un peu plus mitigés que dans le livre, sentiments humiliants inclus, mais cela valait la peine, d'un point de vue humain, d'essayer.

Ma première recommandation sera d'investir dans un forfait pour les transports publics. J'aurais pu écrire "d'acheter un forfait", mais il s'agit vraiment d'un investissement qui en vaut véritablement le prix, habituellement raisonnable ! Les distances en milieu urbain, même si elles semblent habituellement plus courtes qu'en rase campagne, sont beaucoup plus grandes que ce qu'elles n'apparaissent sur une carte. Si vous désirez vraiment voir un petit peu plus que l'environnement immédiat de votre logement, il n'y a pas à hésiter : la formule du pass s'avèrera bien moins chère que de payer chaque course individuellement.
Chicago depuis le Hancock Observatory
Les quelques conseils on ne peut plus concrets qui suivent se basent sur mon expérience personnelle à Chicago en cet été (2010), et dans une moindre mesure à Détroit, mais ils peuvent être mis en pratique dans n'importe quelle autre ville, si ce n'est pour les spécificités propres à chaque endroit... Dès lors, embarquez maintenant avec moi et place au plaisir...

- Prenez la ligne brune du métro aérien (prix inclus dans le forfait susmentionné) et admirez une vue sur le "Loop", une boucle (évidemment) qui ceinture l'un des centres névralgiques de la ville. Le métro de Chicago est en fait un train aérien et constitue une alternative bon marché (quoique fort limitée) aux bus touristiques "hop on hop off". Le circuit dure entre 10 et 15 minutes.
A noter que la ville de Detroit dispose aussi d'un tel moyen de transport.

- Rendez visite au bureau central d'information touristique. Ces gens sont payés pour connaître leur ville et être capables (et ils le sont vraiment) de vous conseiller au mieux selon vos envies, besoins, ... Vous y trouverez aussi, outre les habituels prospectus et autres cartes touristiques, toute une série de publicités contenant les fameux coupons (à utiliser cependant à bon escient) vous octroyant des réductions pour certains restaurants, musées, ou activités diverses... Chicago dispose aussi d'un accueillant service de "bienvenue", où des citoyens vous emmènent gratuitement pour une petite promenade d'une heure en centre-ville, pour vous parler de leur cité. Ils peuvent même aussi personnaliser leur itinéraire en fonction de vos propres goûts et centres d'intérêt.

- N'oubliez pas de vous renseigner au sujet des jours ou horaires auxquels les musées vous ouvrent gracieusement leurs portes : avec un tout petit peu d'organisation vous serez en mesure de mettre sur pied un plan de rotation efficace et varié, suivant les différents thèmes et quartiers de la ville (le Mexican Art est toujours gratuit, l'Art Institute of Chicago l'est chaque jeudi à partir de 17 heures tandis que le Chicago History Museum l'est tous les lundis...). Voilà encore quelques heures bon marché grapillées à la morosité.

- Profitez aussi d'un repas exotique bon marché à Chinatown. La nourriture y est vraiment excellente et vous serez certain d'en avoir à suffisance dans votre assiette. Rapport qualité / prix imbattable. Recommandantion valable pour toute ville hébergeant une "cité" chinoise : elle a notamment été testée aussi avec le même entrain à Montréal.
Pour les cas d'extrême urgence, si vous avez vraiment soif et plus un rond en poche, direction le casino le plus proche. Non pas pour y jouer votre chemise, mais pour vous abreuver à la fontaine de boissons. Ces établissements, la plupart du temps ouverts vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sont en effet tenus de proposer gratuitement à leurs clients des boissons non alcoolisées (c'est mieux que rien !). Evidemment, ne dites pas aux cerbères à l'entrée que vous mourez de soif, mais plutôt que vous venez vous amuser un peu : vous augementerez de la sorte singulièrement vos chances de pénétrer dans ce saint des saints.

- Prenez le temps de flâner quelque peu dans l'un des nombreux parcs de la ville. Il s'y passe toujours quelque chose, que ce soit des concerts, un marché fermier, des expositions, des leçons de danse ou même peut-être un match de base-ball de ligue régionale (d'habitude les dimanches matins). Il ne vous faudra que quelques minutes pour en comprendre les règles de base et être ainsi en mesure de soutenir adéquatement votre équipe favorite. Le parc Lincoln héberge quant à lui un zoo dont l'accès est gratuit, ainsi qu'un très joli point de vue sur les gratte-ciels.

- Allez à la plage. Chicago est située sur la rive du lac Michigan et met plus de vingt plages à votre disposition. Vous pouvez aussi vouloir vous rendre pour une petite promenade dans la marina de Lincoln Park. Les beaux points de vue ne manquent pas, tout comme les belles voitures d'ailleurs...

- Dernière suggestion que je voudrais mentionner ici, et pas la moindre, un des spectacles les plus époustouflants auxquels il m'a été donné d'assister à Chicago consistait simplement à admirer en début de soirée le paysage des tours de la ville depuis le promontoire du planétarium et d'y attendre que le soleil se couche.Vue depuis le planetarium Il s'agit véritablement d'un spectacle magnifique, 100% naturel, gratuit, écologique, inoubliable (à vous de sélectionner le qualificatif que vous préférez).

Il y a toujours quelque chose à faire en ville. On peut évidemment préférer la campagne, mais il est assuré qu'une bourgade d'une certaine importance n'est pas sans offrir quelques charmes. Il y en a pour tous les goûts, et vous y ferez assurément des rencontres étonnantes, intéressantes, peut-être même dangereuses. Pour en profiter pleinement, gardez non seulement vos yeux bien ouverts, mais encore tous vos sens en éveil. Et prenez garde où vos pas vous mènent... Tout ce qui brille n'est pas or !


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(1)Laurent Gounelle, "L'homme qui voulait être heureux", Editions Anne Carrière, Paris, 2008.
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